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association des parents d'élèves école F. Roosevelt
25 septembre 2014

Jean-Claude Gaudin doit démissionner (Le Monde.fr | 25.09.2014 à 11h03)

Jean-Claude Gaudin, maire UMP de Marseille, a été pris à partie, mardi 2 septembre, par des parents d'élèves mécontents de sa gestion de la réforme des rythmes scolaires.

 Grèves de poubelles, embrouilles judiciaires, grèves de cantines, blocage du port, du trafic maritime : les crises marseillaises sont réputées incompréhensibles et il est souvent bien difficile d'en déterminer les causes et d'en désigner les responsables. Cette fois-ci, c'est extrêmement simple. Et grave.

Le gouvernement a imposé aux municipalités une réforme des rythmes scolaires sur laquelle chacun peut avoir son avis et qui, en tout état de cause, était difficile à mettre en place. Certains maires, très minoritaires, ont crânement baissé les bras, restant au statu quo ante. Les autres ont appliqué la loi avec plus ou moins de volonté, de moyens, d'imagination. Mais, dans toutes les villes de France, les parents savaient, le 2 septembre 2014, comment se déroulait désormais la semaine scolaire et avaient pu prendre leur disposition en conséquences. Dans toutes les villes ? Non. Toutes, sauf une. À Marseille (plus de 700 000 habitants), le 2 septembre, les parents des 70 000 élèves du cycle primaire venaient d'apprendre par voie d'affichage que ces derniers auraient classe désormais les mercredis matin et, surtout, que le vendredi après-midi serait consacré à des activités périscolaires… dès que celles-ci pourraient être mises en place. Dans ce laps de temps, était-il précisé, les élèves étaient, le vendredi après-midi, à charge de leurs parents.

Ce même 2 septembre, Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, est pris à parti par un père de famille s'étonnant qu'après plus d'un an de supposée préparation, on apprenne que les enfants des écoles étaient tout bonnement mis à la rue un après-midi par semaine. Excédé, le premier magistrat répond cette phrase déjà historique : « Occupez-vous, vous aussi, de vos enfants ! ». Deux jours après cette injure publique, son adjointe depuis 20 ans à la vie scolaire, Madame Danielle Casanova (qui parle encore dans certains de ses courriers de « l'école communale »), déclarait qu'elle espérait que les parents ne seraient pas « dans une opposition un peu stupide ».

Parmi ces parents potentiellement stupides, plusieurs étaient déjà en train de perdre une partie de leurs salaires voire leur emploi ou encore d'engager des frais de garde d'enfants inattendus. Des grands-parents étaient déjà sollicités par leur famille pour venir, parfois de l'autre bout de la France et à leur propre frais, pallier les défaillances du service public.

Les causes de cette gabegie sont sans aucun mystère. Jean-Claude Gaudin avait d'abord affirmé haut et fort qu'il n'appliquerait pas la réforme, ce qui avait donné quelque espoir à certains parents, qui doutaient de sa bonne mise en musique dans le contexte marseillais. Ailleurs en France, des maires réfractaires pensaient avoir trouvé dans celui de la cité phocéenne leur héraut. Les uns et les autres oubliaient que le courage n'a jamais été la marque de Monsieur Gaudin. Au lendemain du 14 juillet, après un très mou bras de fer avec le gouvernement, il tourne casaque et décide, dans le cadre de la loi, de regrouper les activités périscolaires un après-midi par semaine.

Le premier animateur n'est pas encore recruté, le taux horaire est de 10 euros brut, mais, pour autant, Monsieur Gaudin ne choisit pas de décaler les après-midi dédiés au temps périscolaire suivant les écoles, de sorte à pouvoir embaucher moins d'animateurs sur des contrats un tant soit peu attractifs. Car, lorsque Monsieur Gaudin rate quelque chose, il prend soin de le faire complètement.

Trois semaines après la rentrée, des garderies (d'abord non prévues) sont mises en place dans le désordre le plus total, parfois accompagnées d'animations, bien sûr indigentes – mais, cela n'est pas le plus grave. Ces garderies, lorsqu'elles existent, ne sont acceptées par les parents qu'au cas par cas suivant la gravité des ennuis professionnels qu'ils encourent et le degré de sécurité induit par les taux d'encadrement, fort variables. Parmi les personnels municipaux, nombreux sont ceux qui préfèrent se mettre en grève les vendredis après-midi plutôt que de se trouver responsables de situations dangereuses pour les enfants.

Loin de chercher une solution pour ceux-ci et porter secours à ceux de leurs parents qui sont en train de perdre de l'argent, des salaires, des opportunités de progresser professionnellement, voire leur emploi, Monsieur Gaudin placent ses derniers espoirs dans ce dernier point : les grèves immobiliseront la plus grande partie des écoles le vendredi après-midi. C'est ce à quoi appellent tous les syndicats, mis à part Force Ouvrière (FO) qui est à Marseille, depuis l'après-guerre, le syndicat officiel (Monsieur Gaudin préfère dire « représentatif ») : ce seront donc eux les coupables. Il est en effet évident, maintenant, que Monsieur Gaudin ne peut décemment plus désigner le gouvernement comme responsable de sa propre incurie. C'est ce qu'il avait d'abord voulu faire ; mais comment cacher aux Marseillais que toutes les municipalités de France, quel que soit leur nombre d'habitants, qu'elles soient riches ou pauvres, de gauche ou de droite, favorables ou non à la réforme, ont su organiser les nouveaux temps scolaires sans pénaliser leurs administrés ? Restent les syndicats. Et là, Monsieur Gaudin serait, en temps « normal », à son affaire. Il attendrait un ou deux mois, et, lorsque la situation aurait bien pourri, sifflerait « la fin de la récréation » dans un entretien solennel qu'il accorderait à la presse quotidienne régionale.

Mais Monsieur Gaudin est aujourd'hui confronté à une situation pour lui inédite. Il a dû, ce week-end, renoncer à faire visiter, comme il le fait tous les ans à l'occasion des journées du patrimoine, son bureau « par craintes des manifs », ainsi que le précise le site du journal La Provence. La manif a effectivement eu lieu ce samedi 2 septembre. Trouvant porte close à la mairie, le cortège s'est dirigé non loin, rue de la République. On fêtait les 150 ans de cette artère haussmanienne, et le maire y était attendu pour un apéritif. Des manifestants ont occupé l'estrade… et le maire ne s'est pas montré.

Un Marseillais, interrogé par un journaliste l'a bien résumé : « Gaudin a joué, il a perdu ; c'est les enfants qui payent ». Au Royaume-Uni, un autre élu local vient également de jouer et de perdre. Quoiqu'il n'ait pas agressé ni insulté ses concitoyens, il a immédiatement démissionné. Ce serait le moins que puisse faire un maire qui, en étant le seul de France à ne pas avoir anticipé la mise en place d'une loi, a commis une faute grave. Il a mis en danger des enfants et créé pour leurs parents les plus fragiles des situations dramatiques – dont ils saisiront, bien entendu, les tribunaux. Pour sauver le peu de dignité où le réduit toute cette affaire, Monsieur Gaudin doit laisser la place à un autre membre du conseil municipal élu en mars dernier.

Sans quoi il s'expose personnellement, de la part de ceux qu'il a frontalement et cyniquement agressés, à une mobilisation bien plus tenace, bien moins classique et rencontrant bien plus d'échos dans la population qu'il ne le croit peut-être. « Occupez-vous de vos enfants » : à son corps défendant, Monsieur Gaudin a, par cette formule, aidé ses administrés prendre conscience de tout ce dont il faudrait, dans cette ville, mieux « s'occuper ». Sans lui.

Le préfet des Bouches-du-Rhône et Madame la Ministre de l'Éduction nationale n'ont à ce jour pas répondu aux courriers de collectifs de parents les alertant de la situation des écoles à Marseille.

David Gaussen (Editeur)

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